Une petite histoire du camellia

Les origines du Camellia

Les premiers témoignages d'utilisation et de culture du camellia en Chine datent d'environ 5 000 ans. Il s'agissait essentiellement de thé, qui est une espèce de camellia (thea sinensis ou camellia sinensis). Il existe une longue tradition de culture du camellia en Chine et au Japon, essentiellement dans le but de produire du thé (C. sinensis) ou de l'huile (C. Oleifera). En Chine, le thé est une boisson séculaire, consommée bien avant notre ère. Au Japon, le thé est d'abord un art de vivre, connu, dans un premier temps, grâce à des objets décoratifs. Mais, comme en Chine, c'est une réalité économique. On y produisait aussi thé et huile.

L'arrivée du Camellia en Europe et son rayonnement

Le genre « Camellia » doit son nom à l'hommage rendu, à titre posthume, par Karl Linné, botaniste et taxonomiste suédois, à Georges Joseph Kamel (1661-1706), apothicaire et botaniste d'institutions jésuites, ayant oeuvré particulièrement aux Philippines.
On dit, mais cela reste un mystère, que le premier camellia introduit en Europe aurait été au Portugal dès le 16ème siècle.
L'histoire du camellia en Europe commença vraiment en Angleterre. Même si le climat ne lui était pas à priori propice. On le cultivait sous serre, du moins dans les premiers temps.

Les anglais prospectaient et ramenaient des végétaux variés de leurs voyages. C'est ainsi que les premiers camellias arrivèrent en Angleterre au début du 18 ème siècle. James Petiver, apothicaire, décrivit en 1702, une plante à fleur rouge, nommée 'Thea Chinensis'. Les Anglais cherchaient à se procurer le « thé ». Si Cunningham, chirurgien et botaniste, rapporta C. sinensis et C. fraterna, la reproduction de ces plantes à « thé » n'eut pas le résultat escompté. On raconte aussi que les anglais furent abusés en se voyant confier des arbustes d'ornement à la place des théiers convoités. Sans nul doute, il s'agissait alors de C. japonica, l'espèce botanique (ci-contre).

En 1739, on cultiva donc en Angleterre les premiers pieds de camellia japonica. C'était alors une plante réservée à une élite, car rare et très chère.
Cette plante se répandit rapidement dans les cours royales et princières européennes. George III la fit planter en Allemagne à Pillnitz, près de Dresde. Le pied y vit toujours, protégé en hiver par une serre immense, vu sa taille impressionnante (photo ci-contre). On le cultiva aussi en Italie (Caserte), aux Pays-Bas et en France. On ne connaissait donc alors en Europe que le C. japonica.

Au début du 19 ème siècle, Henri Favre (maire de Nantes) découvrit que le camellia pouvait très bien vivre hors des serres. Le climat breton lui était particulièrement favorable. Il se créa ainsi de nombreuses pépinières en Bretagne et en Anjou. Les obtentions nantaises furent alors nombreuses. Le Jardin des Plantes de Nantes regroupe encore aujourd'hui les vieilles collections et des obtentions plus récentes. Il reste un des jardins de référence pour les camelliophiles grâce à la diversité des cultivars qu'on peut y admirer (photo ci-dessous).

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Dès le début du 19è siècle, les Européens, en Angleterre, en Belgique et en Italie, créent de nombreux cultivars tout en continuant à importer des cultivars asiatiques, toujours issus de l'espèce japonica.
L'histoire du camellia en Belgique est très riche. La Belgique compta des obtenteurs célèbres (von Siebold, Verschaffelt, de Bisschop&) et nombre de cultivars connus. L'industrie du camellia y a été très développée.
En 1820, le Capitaine Richard Rawes importa le premier Reticulata en angleterre, il fut baptisé Captain Rawes. Il resta le seul reticulata connu et cultivé en Europe pendant plus d'un siècle.
On écrivit les premiers ouvrages sur les camellias au milieu du 19ème siècle. L'Abbé Berlèse, collectionneur et érudit italien, publia sa « Monographie du genre Camellia » (1837), et surtout son « Iconographie du genre Camellia » (1841). Ambroise Verschaffelt, fils d'un grand pépiniériste belge, écrivit à la même époque une série de livres (treize en tout) : « L'iconographie des camellias » (1848 à 1860).

Le Camellia dans les pays anglo-saxons

Dans les pays anglo-saxons, la diffusion fut fulgurante.
Le camellia arriva aux Etats-Unis au 18ème siècle. Des cultivars de C. Japonica furent importés d'Angleterre avec succès. On les cultiva d'abord dans l'état de New-York, sous serres. Le camellia gagna du terrain, il arriva à Philadelphie (conservatoire à Longwood Garten, aujourd'hui dédié aux camellias rustiques). Puis, il descendit vers Charleston, où les collections sont impressionnantes. Il arriva en Californie, à Sacramento, où il prospéra, paradoxalement, malgré le climat très chaud.
Les premiers camellias firent leur apparition en Australie en 1826. L'engouement fut rapide, on importa des cultivars du Royaume Uni et les producteurs firent leurs propres semis.
En Nouvelle-Zélande, il règne, dans l'Ile du Nord, un climat idéal pour cultiver les camellias. Les premiers cultivars étaient originaires d'Angleterre, mais aussi de France. Le premier camellia fut planté en 1840.
Dans la seconde moitié du 19ème siècle, la plante connut un regain d'intérêt. Alexandre Dumas fils, avec son roman, « la Dame aux camélias » (publié en 1848) contribua à son succès. Mais il légua aussi cette fausse orthographe de « Camélia » qu'on retrouve trop souvent aujourd'hui.
Pendant une bonne partie du 19ème siècle, le camellia ne fut pas une plante populaire car il restait réservé à l'aristocratie.
L'intérêt pour le camellia diminua fortement entre 1880 et 1920.


Le renouveau du Camellia

Au début du 20ème siècle, dans les années 30, J.C. Williams, en Cornouaille anglaise, obtint le premier hybride européen de camellia, croisement entre l'espèce saluenensis, récemment importée de Chine, et un cultivar de japonica. D'autres hybrides de saluenensis furent créés, de plus en plus nombreux, par J.C. Williams et d'autres obtenteurs, auxquels on donna, par reconnaissance, le surnom de « williamsii ». Un des plus célèbres encore aujourd'hui, est Donation', surnommé « the flower power » ( photo ci-dessous). Dans tous les coins du monde, on trouve leurs descendants. On recherche de nouveaux coloris, des camellias adaptés aux climats froids. Enfin, le camellia se démocratise.
Malgré ce renouveau parti d'Angleterre, les obtentions européennes furent relativement peu nombreuses au 20e siècle. En Belgique, le dernier obtenteur, Roger de Bisschop est décédé en 2006.

Ce sont les Américains (en particulier les Californiens), les Australiens, et les Néo-Zélandais qui devinrent les principaux obtenteurs de nouvelles variétés.
En Californie, aujourd'hui, l'activité du camellia, et surtout les expositions, très réputées, sont localisées dans le sud. Les obtenteurs sont nombreux et le plus connu chez nous est Nuccio.
En Australie, le professeur E.G. Waterhouse produisit de nombreux hybrides. Il fut le fondateur et le premier président de l'International Camellia Society. Il a laissé au public son jardin d'Eryldène.
Aujourd'hui, on connait aussi la pépinière Paradise et sa série de sasanqua (ci dessous : 'Paradise Caroline').
'Paradise Caroline'
'Paradise Caroline'
En Nouvelle-Zélande, les nouvelles variétés furent nombreuses au 20ème siècle, et les camellias toujours très populaires. En France, on connaît les pépinières Jury et leurs nombreuses obtentions, par exemple : 'Elegant Beauty' (ci-contre).
'Elegant Beauty'
'Elegant Beauty'

En France, la production est aujourd'hui surtout concentrée en Bretagne, essentiellement dans le Finistère et dans la région nantaise. On trouve aussi des producteurs de camellias en Anjou, dans les Landes, et les Cévennes.
Toutes les variétés de camellias qui ont pu être recensées par la Société Internationale du Camellia ont été compilées dans un ouvrage en 2 tomes, en 1991, l'International Camellia Register, complété par un supplément en 1997. On y trouve les noms, et les descriptions plus ou moins étoffées, de plus de 35 000 variétés de camellias.